Les critiques de Bertrand Cantat ne font rien d’autre que d’exprimer leur légitimité citoyenne…

… et ils ont bien raison.
Résumons.
Bertrand Cantant souhaite redevenir un personnage public.
Après de nombreux faux pas, et face à la levée des critiques populaires, il annule finalement sa participation à tous les festivals où il devait se produire cet été.
Pour s’expliquer, il publie sur sa page Facebook un texte ampoulé où les contresens juridiques révèlent surtout son égo et son immense froideur psychologique – pour ne pas dire plus : https://www.facebook.com/bertrandcantat/photos/a.173284676561318.1073741828.168864573669995/220347715188347/?type=3&theater
 
Conclusion ? À le lire, ce ne serait pas Marie Trintignant où d’autres femmes qui seraient les victimes, mais lui-même, auquel on refuserait le « droit à la réinsertion », le « droit d’exercer mon métier », mais aussi ses proches qui ne pourraient vivre en France sans subir la « pression » ou la « calomnie », et bien sur son public qu’on empêche de l’écouter ou de venir à ses concerts.
Autrement dit, et comme souvent avec les manipulateurs, l’explication n’a rien d’une excuse ou d’une prise de décision. Elle n’est qu’une étape permettant de mobiliser son entourage, de se mettre à son meilleur avantage, et de préparer le prochain coup.
Alors que penser quand on voit sur Facebook ou sur Twitter le nombre de gens qui défendent le « droit » de Bertrand Cantat à « exercer mon métier » je me pose des questions ? Est-ce qu’il suffit vraiment de tordre le sens des mots pour raconter n’importe quoi ? Est-ce que personne n’est par exemple choqué que Bertrand Cantant renverse la notion de droit à la réinsertion pour l’appliquer à lui – meurtrier, chanteur, célèbre et riche.
Mais surtout, comment se fait-il que la foule des commentateurs se laisse ainsi convaincre par son discours sans jamais manifester la moindre empathie pour ses victimes ? Quel est donc ce procès en légitimité qui leur est fait ? Pourquoi aller faire reproche à tous ceux qui s’insurgent de sa volonté de redevenir un personnage public ? La foule des indignées serait elle moins légitime que la foule des fans de ce chanteur ?
 
Et de toute façon, est-ce que ses chansons sur lesquelles se projetaient les ados ont encore le moindre sens aujourd’hui ? Ce que démontrent les scandales récents autour de Harvey Weinstein, de Louie CK ou des autres, c’est que la vie d’un artiste a autant d’importance que son oeuvre, et ce n’est que justice dans la mesure où c’est le public qui fait la légitimité de l’artiste.
Quant à la liberté de juger, il faut rappeler qu’elle est ouverte à tous, tout le temps, partout, et pas seulement limitée aux salles des tribunaux. Il paraît même que c’est ce qui fait de nous des êtres humains et des citoyens dans une démocratie.
C’est aussi ce dont devraient se souvenir tous ceux qui ont condamné, menacé, critiqué les victimes de harcèlement ayant participé au mouvement #balancetonporc.
La parole est libre. Le jugement est légitime. S’il ne plait pas ? Hé bien tant pis. On ne peut pas à la fois se réclamer de la légitimité du public, et vouloir s’en protéger quand celui-ci vous rejette. Quant aux limites, elles sont claires. Ce sont la diffamation, l’injure, le harcèlement. En-deça, nous sommes dans le débat public. C’est la légitimité de la démocratie.
 
Restent ceux qui estiment honnêtement que Bertrand Cantant a vraiment besoin qu’on prenne sa défense publiquement, c‘est peut-être l’occasion de leur rappeler qu’il y a bien d’autres causes plus légitimes… mais chacun ses combats. Comme il est dit dans l’Ecclesiaste,« Partout des opprimés baignés de larmes, et personne pour les consoler ! »… rien de nouveau sous le soleil.